« Parmi les vierges, il y en a dont le pieux amour pour la Sainte Vierge les ravit tellement, qu’elles ne mentionnent jamais Jésus sans le nom glorieux de leur Mère, notre corédemptrice, la Bienheureuse Marie. » [1]
Décret de la suprême congrégation du Saint-Office du 27 mars 1913.
De nos jours, certaines personnes soutiennent que « le titre « corédemptrice » est faux et doit être rejeté. » [2] Malheureusement, ce discours donne indirectement raison aux modernistes. En effet, lors d’une homélie à la Basilique Vaticane le 12 Décembre 2019, le prétendu « pape » François a déclaré au sujet de la Vierge Marie : « Elle ne s’est jamais présentée comme corédemptrice. » [3] Sur cette question, Joseph Ratzinger est même allé encore plus loin que son successeur en écrivant que « Le concept de corédemptrice s’écarte aussi bien de l’Écriture que des écrits patristiques. » [4]
Pourtant, dans l’esprit des catholiques, le titre de « corédemptrice » n’a jamais signifié que Marie avait racheté tous les péchés de l’humanité comme l’a fait le Christ par son sacrifice. En réalité, le terme de « corédemptrice » indique simplement que Marie a collaboré efficacement à la Rédemption du genre humain, en acceptant d’accomplir la double mission qui lui avait été confiée par Dieu, [5] à savoir : d’une part, de mettre au monde l’unique Rédempteur, [6] et d’autre part, de l’accompagner dans sa Passion. [7]
Par conséquent, même si Marie ne peut pas être élevée au même rang que son Fils, il n’en demeure pas moins qu’Elle a participé activement aux mérites de la Passion du Christ, en partageant toutes les souffrances qu’Il a enduré, bien qu’Elle n’ait pas éprouvé dans sa chair la douleur de son martyr. C’est donc dans ce sens – et en ce sens uniquement – que nous pouvons considérer Marie comme notre « corédemptrice », tout comme nous la considérons également comme notre « Avocate » parce que nous savons aussi qu’Elle est la Mère de Notre Seigneur [8] qui est Lui-même « un Avocat auprès du Père » (1 Jean 2 ; 1).
Rappelons-nous d’ailleurs que Léon XIII fut le premier pape à avoir précisément traité la question du rôle joué par Marie dans la rédemption. « En effet, » – écrivait-il – « la Vierge exempte de la souillure originelle, choisie pour être la Mère de Dieu, et par cela même associée à lui dans l’œuvre du salut du genre humain, jouit auprès de son Fils d’une telle faveur et d’une telle puissance que jamais la nature humaine et la nature angélique n’ont pu et ne peuvent obtenir. » [9]
Dans un autre document, ce même pape a également écrit : « Selon les desseins de Dieu, Elle [Marie] a commencé à veiller sur l’Église, à nous assister et à nous protéger comme une Mère, de sorte qu’après avoir été coopératrice de la Rédemption humaine, Elle est devenue aussi, par le pouvoir immense qui lui a été accordé, la dispensatrice de la grâce qui découle de cette Rédemption pour tous les temps. » [10]
Saint Pie X confirma ensuite la doctrine de Léon XIII en écrivant : « Aussi, entre Marie et Jésus, il y a une perpétuelle société de vie et de souffrance, qui fait qu’on peut leur appliquer à égal titre cette parole du prophète : « Ma vie s’est consumée dans la douleur et mes années dans les gémissements » (Psaumes 30 ; 11). Et quand vint pour Jésus l’heure suprême, on vit la Vierge « debout auprès de la croix, saisie sans doute par l’horreur du spectacle, mais heureuse pourtant de ce que son Fils s’immolait pour le salut du genre humain, et participant d’ailleurs tellement à ses douleurs que de prendre sur elle les tourments qu’il endurait, lui aurait paru, si la chose était possible, infiniment préférable. » (S. Bonav., I Sent., d. 48, ad Litt., dub. 4). La conséquence de cette communauté de sentiment entre Marie et Jésus, c’est que Marie « mérita très légitimement de devenir la réparatrice de l’humanité déchue » (Eadmeri mon., De Excellentia Virg. Mariae, c. IX), et la dispensatrice de tous les trésors que Jésus nous a acquis par sa mort et par son sang. Certes, on ne peut pas dire que la dispensation de ces trésors ne soit pas un droit propre et particulier de Jésus-Christ, car ils sont les fruits exclusifs de sa mort, et lui-même est, de par sa nature, le médiateur de Dieu et des hommes. Toutefois, en raison de cette société de douleurs et d’angoisses entre la Mère et le Fils, il a été donné à cette auguste Vierge « d’être auprès de son Fils unique la très puissante médiatrice et avocate du monde entier » (Piux IX, in Bull. Ineffabilis). […] Il s’en faut donc grandement que Nous attribuons à la Mère de Dieu une vertu productrice de la grâce, vertu qui est de Dieu seul. Néanmoins, parce que Marie l’emporte sur tous en sainteté et en union avec Jésus-Christ et qu’elle a été associée par Jésus-Christ à l’œuvre de la Rédemption, Elle nous mérite « de congruo » [de congruité], comme disent les théologiens, ce que Jésus-Christ nous a mérité « de condigno » [de condignité], et elle est le ministre suprême de la dispensation des grâces. » [11]
Par la suite, Pie XI écrivit que « L’enseignement des docteurs de l’Église, confirmée par la continuelle expérience ressentie par le peuple chrétien, affirme très fortement que la Vierge douloureuse a participé à l’œuvre de la Rédemption avec le Christ, et qu’ainsi constituée Mère des hommes, elle veille sur eux d’un cœur très aimant, comme envers des fils qui lui ont été recommandés par un testament d’une divine charité. » [12]
Pour conclure, notons enfin que l’expression « corédemptrice » fut également utilisée par Pie XI, lors d’un discours dans lequel il a notamment déclaré ceci : « Le Rédempteur se devait, par la force des choses, d’associer sa Mère à son œuvre. C’est pourquoi nous l’invoquons sous le titre de corédemptrice. » [13]
[1] Acta Apostolicae Sedis, Vol. 5, éd. Typis Polyglottis Vaticanis (1913), p. 364
[2] https://www.vaticancatholique.com/pour-refuter-ceux-qui-disent-que-marie-est-co-redemptrice/
[3] https://www.vatican.va/content/francesco/fr/homilies/2019/documents/papa-francesco_20191212_omelia-guadalupe.html
[4] Voici quel est Notre Dieu (2001), p. 215
[5] Évangile selon Saint Luc, chapitre 1, verset 38 : « Alors Marie reprit : Voici la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon votre parole. »
[6] Évangile selon Saint Luc, chapitre 1, versets 30 à 33 : « Mais l’ange lui dit : Ne craignez point, Marie ; vous avez trouvé grâce devant Dieu ; voilà que vous concevrez dans votre sein, et vous enfanterez un fils à qui vous donnerez le nom de Jésus. Il sera grand, et sera appelé le Fils du Très-Haut, et le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David, son père ; et il régnera éternellement sur la maison de Jacob, et son règne n’aura point de fin. »
[7] Évangile selon Saint Luc, chapitre 2, verset 25 à 35 : « Or, il y avait à Jérusalem un homme appelé Siméon, et cet homme juste et craignant Dieu attendait la consolation d’Israël, et l’Esprit-Saint était en lui. Et il avait été averti par l’Esprit-Saint qu’il ne verrait point la mort, qu’auparavant il n’eût vu le Christ du Seigneur. Conduit par l’Esprit, il vint dans le temple. Et comme les parents de l’enfant Jésus l’y apportaient, afin de faire pour lui selon la coutume prescrite par la loi, il le prit entre ses bras, bénit Dieu, et dit : Maintenant, Seigneur, laissez, selon votre parole, votre serviteur s’en aller en paix ; puisque mes yeux ont vu le Sauveur qui vient de vous, que vous avez préparé à la face de tous les peuples ; pour être la lumière qui éclairera les nations, et la gloire d’Israël, votre peuple. Et son père et sa mère étaient dans l’admiration des choses que l’on disait de lui. Et Siméon les bénit et dit à Marie, sa mère : celui-ci a été établi pour la ruine et la résurrection d’un grand nombre en Israël, et en signe que l’on contredira ; et un glaive traversera votre âme, afin que les pensées de beaucoup de cœurs soient révélées. »
[8] Évangile selon Saint Luc, chapitre 1, verset 41 à 43 : « Et il arriva que lorsque Elisabeth entendit la salutation de Marie, l’enfant tressaillit dans son sein, et Élisabeth fut remplie de l’Esprit-Saint ; alors elle s’écria d’une voix forte : vous êtes bénie entre les femmes, et le fruit de votre sein est béni. Et d’où m’arrive-t-il que la mère de mon Seigneur vienne vers moi ? »
[9] Encyclique Supremi apostolatus officio (1er septembre 1883).
[10] Encyclique Adjutricem populi (5 septembre 1895)
[11] Encyclique Ad diem illum laetissimum (2 février 1904).
[12] Lettre apostolique Exploratares (2 février 1923).
[13] Allocution aux pèlerins de Vicenza (30 novembre 1933).