Par son matérialisme et son panthéisme, le système de pensée de Baruch Spinoza a ouvert la voie vers l’athéisme. À travers des arguments rationnels, le docteur de l’Église Saint Alphonse de Liguori démontre l’absurdité de sa doctrine.
“Voici quel est le système exécrable de Spinoza. [1] Il dit que la substance de l’univers est une et simple, mais toute matérielle. Il suppose que cette substance est Dieu, et dit qu’elle est active et passive : passive en ce qu’elle est étendue ; active en ce qu’elle est pensante. De là, Spinoza suppose que toutes les choses particulières de ce monde ne sont que des modifications de la même substance. Il dit que les choses matérielles sont des modifications de la matière passive étendue, les spirituelles de la matière active pensante. Selon lui, il n’y a pas d’objets spirituels, parce que tout et matière.
Ainsi, suivant Spinoza, tout cet univers, composé d’une seule substance matérielle, est Dieu. Tous les hommes, les animaux, les arbres, les montagnes, les eaux et le reste sont autant de modifications de Dieu. Ainsi, le Dieu de Spinoza s’engendre dans un morceau de bois, et se corrompt dans un autre ; il s’aime dans un homme, et il est haï dans un autre ; adoré par celui- ci, blasphémé par celui-là. Tantôt ce Dieu est prêtre aux autels, tantôt voleur sur un grand chemin. Ô mon Dieu ! Mon véritable Dieu ! que ne font pas de vous les hommes que vous avez tant aimés, et placés au-dessus de toutes les créatures !!! Et pourtant, cet insensé, ce fou de Spinoza a trouvé quelqu’un pour l’appeler un grand philosophe. C’est un de ses disciples qui imprima ses ouvrages, et qui proféra ce blasphème, que Spinoza a enseigné une doctrine qui est la même que celle de Jésus- Christ.
Cet écrivain impie a été réfuté par beaucoup d’auteurs, entre autres Durius, Tommasius, Moseus, Morus, etc., etc. Je ne m’attacherai qu’à démontrer la fausseté et l’insuffisance des fondements sur lesquels Spinoza appuie son système, parce que c’est le meilleur moyen et le plus prompt d’en faire ressortir l’absurdité. Le système de Spinoza se réduit à trois propositions principales. La première, c’est qu’il existe une substance unique, étendue et pensante, dont la vertu naturelle, mais aveugle et brutale, produit spontanément toutes choses ; de sorte que rien au monde n’est contingent, mais nécessaire, parce que tout est déterminé à l’existence et à l’action par une nécessité naturelle. La seconde proposition, c’est que cette substance unique, quoique matérielle, est néanmoins indivisible et immuable. La troisième, que cette substance est extrêmement parfaite, et qu’elle contient en soi toutes les réalités et tous les modes de l’être.
À la première proposition, que cette substance unique de Spinoza est matière étendue et pensante, et que tous les êtres matériels sont des êtres nécessaires, nous y avons déjà répondu plus haut au § 1er du quatrième chapitre, où nous avons prouvé que l’être nécessaire ne peut être qu’unique, et que tous les autres êtres, tant matériels que spirituels, sont contingents, et produits par l’être nécessaire, qui est Dieu. [2] Il ne nous reste donc à réfuter que la seconde et la troisième proposition.
La seconde proposition de Spinoza dit qu’il existe une substance matérielle unique, qui n’a point de parties, et qui est indivisible et immuable. Voyons comment il le prouve. Il dit que la substance est ce dont la conception n’exige pas la conception d’une autre chose, de laquelle il doive se former : Substantia est id, cujus conceptus non indiget conceptu alterius , quo formari debeat ; et il argumente ainsi : La conception de la pensée n’a pas besoin de la conception de l’étendue de laquelle elle doit être formée, ni l’étendue n’a besoin de la conception de la pensée : donc, conclut-il, la pensée et l’étendue sont une seule substance. De cette manière, Spinoza réduit toutes choses à n’être que matière ; le corps, qu’il appelle matière passive, étendue, et l’âme, qu’il appelle matière active pensante, l’une et l’autre n’étant que des modifications de la même substance.
Mais nous répondons que l’étendue et la pensée étant de nature toute différente, puisque, ainsi que nous l’avons démontré, l’étendue ne peut convenir à la pensée ; et que la pensée ne peut convenir à la matière étendue, on doit nécessairement dire que l’étendue et la pensée ne sont pas une seule substance, mais bien deux substances tout à fait distinctes et différentes. Spinoza a beau dire que, quoique dans ces deux substances on conçoive deux attributs distincts, l’on ne peut pas dire pour cela que ce sont deux substances différentes : nous n’admettons pas ce raisonnement, parce que nous disons que ce n’est pas là résoudre la difficulté ; mais c’est vouloir changer les mots, et répondre au hasard et sans aucun fondement. Nous disons donc que non seulement l’esprit et la matière sont des substances différentes, mais nous disons aussi que les objets matériels qui forment différentes modifications sont des substances réellement distinctes entre elles sous le rapport de leur individualité. Cela se prouve évidemment par un exemple. Supposons qu’un objet matériel se meuve vers l’orient, et qu’un autre se meuve vers l’occident ; la première substance individuelle ne peut être la même que la seconde, puisque la même substance ne peut avoir en même temps deux inclinations ou deux tendances contraires l’une à l’autre.
Les objets matériels, Spinoza les appelle modifications ou modes d’une substance, et il attribue à ces modes ce que nous attribuons aux objets qui ont une existence à part et individuelle. Mais il répugne au sens commun et à l’évidence de prétendre que des objets individuellement distincts entre eux ne soient pas des objets distincts, mais seulement des modes distincts, et de leur donner le nom de modes. Spinoza dit qu’il n’y a au monde qu’une seule substance : donc le soleil , la mer, un homme, une pierre, ne seraient qu’une même substance ! Il dit que le tout est une seule substance douée d’étendue et de pensée, qui sont les modifications de cette substance unique. Mais ces modifications sont-elles différentes ? Et si elles sont différentes, comment peuvent-elles exister dans le même sujet ? Comment une même substance peut-elle être en même temps ronde et carrée, mobile et immobile ? Il dit que cet ensemble de corps et d’esprits est Dieu. Dieu est donc homme et pierre, prêtre et chien, juste et impie ? Bayle dit que c’est là l’hypothèse la plus extravagante, la plus monstrueuse et la plus opposée aux connaissances de notre esprit que l’on puisse imaginer. C’est inutilement que Spinoza, ayant recours au vide, dit que les substances matérielles ne peuvent se diviser entre elles par la raison que, in rerum natura, le vide n’existe pas, comme il le suppose pour certain. Cela n’est pas admissible, disons-nous, en premier lieu, parce que le principe que le vide n’existe pas n’est qu’une simple opinion, que la plus grande partie des philosophes ne reçoit pas ; en supposant même qu’elle fût vraie, il est certain que, suivant l’une et l’autre opinion, chaque matière est distinguée en parties séparées, et ces parties ou ces corps séparés, ont une substance divisée l’une de l’autre. La terre a certainement une substance séparée de celle de la mer ; les métaux ont une substance séparée de celle des arbres, et il en est de même de mille autres objets matériels : on ne peut donc plus concevoir que tous les objets de matière que nous voyons répandus çà et là, et séparés les uns des autres par l’air, soient identiques et deviennent une seule substance.
La troisième proposition de Spinoza est que cette substance unique qu’il a supposée est infiniment parfaite. Voyons un peu comment il applique cette perfection à sa substance unique : il a inventé une nouvelle distinction de la nature, dont certainement personne encore n’avait entendu parler : celle de nature naturante et de nature naturée. À la nature naturée, il n’attribue pas la perfection ; car, à la quinzième proposition, il affirme que les parties finies ne peuvent composer un être infiniment parfait. Toute la perfection infinie, Spinoza l’attribue à la nature naturante ; mais un être qui serait infiniment parfait devrait contenir en soi et à un degré infini toutes les perfections d’intelligence, de science, de puissance, de bonté, de liberté, de providence, etc. Au contraire, cette nature naturante, imaginée par Spinoza, qu’est-elle ? Elle n’est qu’un être imaginaire, abstrait, métaphysique, conçu par la seule pensée, sans intelligence, ni volonté, ni puissance, ni liberté, ni prévoyance et privée même de l’existence. En sorte que cette nature naturante de Spinoza, non seulement n’a pas les perfections qu’il lui attribue, mais elle n’est pas même une substance ; car une substance sans l’existence réelle n’est pas une substance, mais une pure imagination, un pur néant, un néant très imparfait, qui n’est capable d’aucune perfection. Tel est donc l’être très parfait de Spinoza ; un être privé de toutes les perfections, même de l’existence. Voilà jusqu’à quel degré d’obscurité et de folie descend l’esprit humain lorsqu’il s’écarte de la lumière divine.
Récapitulons ici en peu de mots ce qui a été dit pour prouver l’existence de Dieu par l’existence des âmes, lesquelles, étant spirituelles, ne peuvent ni être produites par la matière ni propagées par d’autres esprits, mais qui, pour exister, doivent être créées par un premier principe qui ait la vertu de créer. Il est certain que s’il existe beaucoup d’âmes dans le monde, donc il y a un Dieu qui les a créées. Mais les matérialistes répondent : Non, il n’y a pas de Dieu ; car il n’y a pas de substances spirituelles ; le corps et l’âme de l’homme, tout est matière. Nous répliquons que l’homme ne peut pas être entièrement matière, puisque l’homme pense, et que la matière ne peut penser : donc ce n’est pas le corps, mais l’âme qui pense dans l’homme. Mais pour quoi la matière ne peut-elle pas penser ? Elle ne peut penser, en premier lieu, par la raison que la nature de la pensée est tout à fait différente de la nature de la matière. La matière n’agit que par le moyen du mouvement de la figure ou du lieu : or, toutes ces choses n’ont rien à faire avec la pensée, qui n’est capable ni de mouvement, ni de figure, ni de lieu, parce qu’elle n’a aucune extension.
En outre, si la matière était capable de penser, elle ne pourrait avoir d’autres idées que de choses matérielles semblables à elle-même, mais non de choses spirituelles. Or, l’homme comprend une foule de choses qui sont purement spirituelles, comme l’essence de la justice, le mérite de la vertu, la noirceur de la trahison, la propriété des objets : l’homme juge, conçoit des desseins, prévoit, abstrait, sépare, distingue, accepte, refuse. Qu’ont de commun avec la matière toutes ces opérations de l’intelligence et de la volonté ? Quelque fois même l’homme juge contre ce que lui représente la matière, suivant l’exemple que nous avons rapporté ci -dessus de la rame placée dans la mer, qui semble brisée, et que l’homme reconnaît pourtant ne l’être pas ; et cela contre ce que démontrent la matière et la vue corporelle.
Si l’homme forme les réflexions, les jugements, les discours, en ayant présentes à sa mémoire plusieurs idées et perceptions, comment ces jugements et ces raisonnements peuvent-ils se former par les mouvements de la matière, comme le prétendent les matérialistes ? Ces diverses idées devraient être considérées comme divers mouvements de parties matérielles ; mais si ces mouvements arrivent en même temps, l’un confondra l’autre ; et s’ils se succèdent en des temps divers, alors, tandis que l’un commencera, l’autre sera déjà fini. De cette manière ces mouvements ne peuvent jamais s’unir ensemble et former l’unique jugement que l’homme est dans l’usage de former à l’aide de plusieurs vérités qui lui sont présentes sur le même point. Et si par le moyen de ces mouvements de parties matérielles, dont l’une ignore la qualité de l’autre, parce qu’elles sont toutes privées d’intelligence, l’homme se trouve dans l’impossibilité de faire un argument, il pourra d’autant moins former un discours, lequel est composé de différents arguments. Il n’y a que l’esprit qui puisse faire cela, parce qu’il saisit en même temps les différentes idées qui sont toutes présentes, et qui doivent concourir ensemble à la formation du discours.
En sorte que, pour conclure la question proposée dans ce chapitre, je répète l’argument que j’ai déjà présenté au commencement. Ainsi que je l’ai dit, cet argument est fondé sur ce principe certain, qui n’a jamais été révoqué en doute, c’est-à-dire que nul ne peut donner ce qu’il n’a pas. Voici comment je raisonne : je sens en moi une âme qui a un esprit, qui pense, qui fait des jugements, des raisonnements, et qui agit librement, comme elle l’entend. Je sais au contraire que la matière est incapable d’avoir cette liberté d’agir, parce qu’elle est inerte, inhabile à se mouvoir, incapable de former des jugements, des raisonnements, parce que, pour cet effet, la sensation de plusieurs parties devrait y concourir : or, l’une ne peut avoir connaissance de la sensation de l’autre. La matière ne peut non plus percevoir aucune pensée, parce que, étant étendue, et composée de plusieurs parties, elle ne peut avoir connaissance exacte d’aucun autre objet. Je conclus donc : l’âme qui existe en moi ne peut être produite par la matière ; l’âme n’est pas éternelle, et n’a pu se donner l’être de soi-même ; elle a donc été créée par un être suprême et spirituel : cet être est Dieu.
Mais avant de finir cette première partie, je ne veux pas omettre de répondre à l’objection de ces impies qui disent que la religion que les hommes professent envers Dieu et une fable qui doit son origine à la politique, à la crainte ou à l’ignorance : je réponds donc que la croyance en Dieu ne doit point son origine ni à la politique, ni à la crainte ni à l’ignorance. Elle ne la doit point à la politique, parce que la religion est une croyance universelle chez tous les hommes, et a été pratiquée constamment pendant tous les siècles depuis le commencement du monde ; ce qui prouve donc que la connaissance de Dieu nous a été insinuée par la nature, et la nature ne peut mentir. « Omnibus enim (dit Cicéron), innatum est, et in animo quasi insculptum, esse Deos ; quales sint, varium est : esse nemo ne gat. (Lib. 2, de Nat. Deor., cap. 4.) Dans le même livre et au chapitre deuxième, Cicéron dit aussi que rien n’est plus évident que l’existence d’une divinité suprême, qui dirige le monde ; et que si la croyance à cette vérité n’était pas fondée en raison, elle n’aurait pu durer tant de siècles ; d’où il conclut que la perpétuité de cette croyance est le jugement de la nature. « Quid enim potest esse tàm apertum , quàm esse aliquod numen præstantissimæ ad mentis quo hæc regantur ? etc… Quod nisi cognitum animis haberemus , non tàm stabilis opinio permuneret; nec confirmaretur diuturnitate temporis, nec una cum seculis ætatibus que hominum inveterare potuisset, etenim videscæteras opiniones fictas diuturnitate extabuisse…. opinionum enim commenta delet dies, naturæ judicia confirmat. »
La croyance d’un Dieu n’a pas non plus tiré son origine de cette crainte que les impies appellent vaine, parce qu’ils nient l’existence d’un vengeur du crime ; mais l’existence de Dieų est bien assez évidente lorsque l’on considère la construction de ce monde, la symétrie avec laquelle il est formé, l’ordre admirable et continuel qui y préside ; nous ne pouvons alors nous empêcher de croire que c’est une cause suprême qui l’a fait et qui le soutient. Ah ! ce n’est pas de la crainte qu’est née la croyance de Dieu ; mais c’est la crainte qui a produit l’impiété de ces incrédules, lesquels, pour échapper à la frayeur des châtiments qui les inquiètent, cherchent à se persuader que Dieu n’est pas là pour les punir.
Ce n’est pas non plus l’ignorance des choses naturelles et de la vertu occulte de la nature (comme ils disent) qui a donné origine à la croyance d’un Dieu. Nous ne voulons pas nier que plusieurs secrets de la nature sont encore ignorés ; mais que s’ensuit-il de la ? Nous avons déjà démontré contre les matérialistes l’existence de Dieu, qui est un pur esprit, créateur et conservateur de toutes choses, et nous avons prouvé, par-là, la fausseté de leur système, que toute chose est matière ou produite par la matière : d’abord parce que les choses toutes matérielles étant produites et non existantes par elles-mêmes, alors même qu’on les supposerait produites par la matière éternelle, par une succession infinie de causes produisantes, ne peuvent jamais être considérées existantes sans un premier principe, puisque, étant dépendantes l’une de l’autre, l’on ne peut s’empêcher d’admettre une première cause indépendante qui les a produites : autrement, ce seraient autant d’effets sans cause. Outre cela, la matière en aucune façon n’a jamais pu être éternelle, parce que n’étant qu’un composé d’objets matériels particuliers qui n’ont pas pu avoir l’être d’eux-mêmes, tous ont dû le recevoir d’un principe supérieur, et indépendant de la matière. En second lieu, la matière étant aveugle et sans esprit n’eût jamais pu produire ce monde, si bien ordonné, ni le conserver dans un ordre aussi constant ; ce qui force de supposer une grande intelligence qui ait formé ce monde et qui continue à le gouverner. En troisième lieu, la matière étant inerte, le monde n’aurait jamais pu avoir le mouvement que nous voyons à tant d’êtres matériels au ciel et sur la terre sans le secours d’un moteur. En quatrième lieu, la matière étant contingente, indifférente à exister et à ne pas exciter, elle n’aurait jamais pu avoir reçu l’existence sans un être nécessaire qui, de fait, lui eût donné l’être. En cinquième lieu, la matière étant incapable de penser, les âmes, qui pensent, n’auraient jamais pu être produites par la matière, mais elles ont dû recevoir l’être d’un principe spirituel.
Ayant démontré par tant et de si fortes preuves la nécessité de l’existence de Dieu, puisque, s’il en était autrement, il n’y aurait ni croyants, ni mécréants, ni âmes, ni aucune des choses qui existent, c’est maintenant aux matérialistes de fonder un système raisonnable, un système qui ne soit pas fabriqué sans fondement, ni vraisemblable, par lequel ils puissent prouver au moins la possibilité de la création de ce monde et de sa conservation sans un Dieu. Mais c’est ce qu’ils ne pourront établir, pas plus qu’ils ne détruiront nos preuves, parce que le Dieu que nous croyons existe certainement, et l’on ne peut former le moindre doute sur son existence ; car, sans Dieu, il n’y aurait rien au monde.”
Source :
Œuvres complètes du Bienheureux A.M De Liguori, Tome XVII, éd. Paul Mellier (1843), Partie I, Chapitre VI, p. 81-91
[1] Saint Alphonse de Liguori : « Benoît Spinoza, cet athée impie, naquit à Amsterdam, en l’an 1632. Il ne professa aucune religion ; et quoiqu’il naquît de parents juifs, il combattit et ridiculisa la doctrine des juifs, au point qu’ils l’excommunièrent. Il ne fut jamais chrétien, comme quelques-uns l’ont prétendu, car il ne reçut point le baptême ; et si on l’appela Benoît, c’est parce que ses parents lui donnèrent le nom de Baruch, qui en notre langue veut dire béni (bene dictus). Il se fit un dieu et une religion à son caprice. Ce misérable vécut presque toujours vagabond, et mourut en 1677 d’une fièvre de consomption, à l’âge de 44 ans. Bayle, dans son dictionnaire (V. Spinoza) dit que sa doctrine eut très peu d’adeptes encore ceux qu’on nomme ne sont pas certains. » (Cf. Œuvres complètes du Bienheureux A.M De Liguori, Tome XVII, éd. Paul Mellier, 1843, Partie I, Chapitre VI, p. 81).
[2] Saint Alphonse de Liguori : « Avant tout, il est nécessaire de voir et de distinguer ici ce qu’est l’être nécessaire et ce qu’est l’être contingent. L’être nécessaire est celui qui existe et qui ne peut pas ne pas exister, parce qu’il existe par lui-même, non par sa propre volonté, mais par la nécessité de sa nature. Existant par lui-même, il doit être nécessairement unique, éternel et très parfait. Il doit être unique, autrement il ne serait pas nécessaire. Il doit être éternel, car existant par lui-même et non par un autre, s’il n’était pas ab æterno, il n’aurait pu se donner l’existence quand il n’était pas ; le néant ne peut pas se donner l’existence à lui-même. En outre, il aurait été en même temps non existant et existant : non existant, parce qu’il y eut un temps où il n’était pas : et existant, parce qu’il aurait eu la puissance de se donner l’être ; celui en effet qui a une telle puissance doit nécessaire ment exister. Or, être à la fois existant et non existant, ce sont des choses qui répugnent complétement. Il doit être encore très parfait, parce qu’ayant en soi la plus grande perfection, qui est l’existence indépendante, aucune perfection ne peut lui manquer ; et ayant l’existence par lui-même, il n’y a pas d’autre puissance capable de borner ses perfections. Ces perfections, il peut les borner lui-même, parce qu’elles ne sont pas arbitraires, mais absolument nécessaires et intrinsèques à sa nature. Nous disons donc que cet être nécessaire est notre Dieu. L’être contingent est celui qui est indifférent exister et à ne pas exister, et c’est pour cela qu’il a besoin qu’un autre le détermine à l’existence ; de manière que s’il n’y eût pas eu d’être nécessaire qui eût déter miné à l’existence tous les autres êtres contingents, il n’y aurait aujourd’hui aucun être existant. Or, voyons maintenant combien de choses contingentes : des arbres qui germent et qui se dessèchent ; des sources qui jaillissent et qui tarissent; des animaux qui naissent et qui périssent. Toutes ces choses, ainsi contingentes, démontrent l’existence de l’être nécessaire qui les a produites et qui les a déterminées à exister ; dans le cas contraire, il n’y aurait rien de tout ce que nous voyons. » (Cf. Œuvres complètes du Bienheureux A.M De Liguori, Tome XVII, éd. Paul Mellier, 1843, Partie I, Chapitre IV, p. 37-38).