Il est fréquent d’entendre de la part de conciliaires que les consécrations épisicopales que réalisa Mgr Thuc étaient illégitimes en raison du fait qu’elles ont été faites sans mandat explicite.Cet article réfute ces accusations en montrant que dans certaines circonstances particulières, selon les principes mêmes de l’Eglise, ce genre de consécrations peuvent être permises en vertu du principe d’epikie.En effet, le siège étant vacant à l’époque ces consécrations étaient rendues nécessaires pour assurer la continuité de l’Eglise et elles furent donc pleinement légitimes.
Joseph Ratzinger : « Il résulte maintenant à cette Sainte Congrégation que S. Exc. Mgr Ngo Dinh-Thuc, à partir de 1981, a de nouveau procédé à des ordinations presbytérales contraires aux prescriptions du canon 955. Bien plus, il a encore procédé, cette même année, en violation des normes du canon 953, sans mandat pontifical ni provision canonique, à l’ordination épiscopale du religieux français M.-L. Guérard des Lauriers, O.P., et des prêtres mexicains Moïsés Carmona et Adolfo Zamora ; dans la suite, Moïsés Carmona a pour sa part conféré l’ordination épiscopale aux prêtres mexicains Benigno Bravo et Roberto Martinez, ainsi qu’au prêtre américain George Musey. En outre, S. Exc. Mgr Ngo Dinh-Thuc a voulu légitimer son action, notamment par une déclaration datée de Munich le 25 février 1982, dans laquelle il affirme que le Siège apostolique est actuellement vacant, et qu’il lui revient, “en tant qu’évêque, d’assurer la continuité de l’Église catholique romaine, en vue du salut des âmes.” En raison de la gravité de ces délits et du caractère aberrant de ces affirmations, la S. Congrégation pour la Doctrine de la Foi, par mandat spécial de Sa Sainteté le Pape Jean-Paul II, estime nécessaire de rappeler la substance de son décret du 17 septembre 1976, qui s’applique à nouveau pleinement dans le cas présent, à savoir : 1) Les évêques qui ont ordonné d’autres évêques, et les évêques qu’ils ont ordonnés encourent, outre les sanctions prévues par les canons 2370 et 2373, § 1 et 3 du Code de droit canonique, l’excommunication ipso facto très spécialement réservée au Siège apostolique, dont il est question dans le décret publié par la Sainte Congrégation du Saint-Office le 9 avril 1951 (AAS XLIII, 1951, p. 217 et s.). La peine prévue par le canon 2370 s’applique aussi aux prêtres assistants, s’il y en avait. 2) Les prêtres ainsi ordonnés illégitimement sont, en vertu du canon 2374, suspendus ipso facto, de l’Ordre qu’ils ont reçu, et même frappés d’irrégularité s’ils accomplissent un acte réservé à cet ordre (can. 987, § 7). 3) Enfin, quoi qu’il en soit de la validité des ordres, l’Église ne reconnaît ni ne reconnaîtra l’ordination de ceux qui, déjà, ont ainsi été ordonnés illégitimement ou de ceux qui éventuellement seraient ordonnés par eux. Pour tous les effets juridiques, l’Église considère que chacun d’eux est resté dans l’état qui était le sien auparavant,[1]Cette phrase semble indiquer que Ratzinger n’était pas tout à fait certain de la validité des sacres conférés par Mgr Thuc et Mgr Carmona. demeurant fermes, jusqu’à ce qu’ils reviennent à résipiscence, […] Cette Congrégation doit enfin mettre en garde les fidèles, afin qu’ils ne donnent en aucune manière leur participation et leur soutien aux activités liturgiques (ou autres)[2]En d’autres termes, si Ratzinger estime qu’il est parfaitement licite d’aller prier dans une mosquée ou dans une synagogue (comme lui-même a déjà eu l’occasion de le faire à plusieurs … Continue readingorganisées par les personnes sus-indiquées. »[3]Notification de la congrégation pour la doctrine de la foi (12 Mars 1983).
Pour réfuter les allégations proférées par Ratzinger, nous exposerons succinctement les raisons qui ont poussé un petit nombre de clercs à déroger de manière informelle à certaines lois disciplinaires en vue de sauvegarder le sacerdoce catholique. D’abord, « En ce qui concerne l’administration des saints ordres » – écrivait Saint Thomas d’Aquin – « pour autant que l’évêque ordonnant, qu’il soit catholique ou apostat, observe extérieurement le rite prescrit pour le sacrement, il doit être présumé avoir l’intention correcte, et le sacrement doit être tenu pour valide. »[4]Somme théologique, Partie III, Question 64, Article 8. Le docteur Angélique développait son opinion en précisant ce qui suit : « Le pouvoir sacramentel est celui qui est conféré par une consécration. Toutes les consécrations de l’Église sont immuables, tant que dure la chose consacrée. Un tel pouvoir, selon son essence, demeure-en celui qui l’a reçu par consécration aussi longtemps que celui-ci reste en vie, s’égarerait-il dans le schisme ou l’hérésie. Cela est clair du fait qu’il n’est pas consacré de nouveau s’il revient à l’Église. Mais, parce qu’un pouvoir inférieur ne doit passer à l’acte que sous la motion d’un pouvoir supérieur, comme on le voit même dans les choses de la nature, il en résulte que ces hommes perdent l’usage de leur pouvoir et qu’il ne leur est plus permis d’en user. S’ils en usent cependant, leur pouvoir obtient son effet dans le domaine sacramentel, car en celui-ci l’homme n’agit que comme instrument de Dieu ; aussi les effets sacramentels ne sont-ils pas annulés par n’importe quelle faute chez celui qui confère le sacrement. »[5]Somme théologique IIa-IIae, Question 39, Article 3.
Du reste, en se basant sur l’enseignement du pape Paul IV, le pape Léon XIII déclarait que le fait de « Recevoir les Ordres d’une façon nulle, c’est les recevoir par un acte vain et sans effet, c’est-à-dire invalidement » c’est pourquoi « en réponse aux hésitations de plusieurs se demandant quels évêques pouvaient être regardés comme ordonnés régulièrement et selon le rite dans l’intention du Pontife, celui-ci, peu après, le 30 octobre, publia une seconde Lettre en forme de Bref, où il disait : “Pour mettre un terme à ces hésitations et rassurer la conscience de ceux qui ont été promus aux Ordres durant le schisme, en exposant plus nettement la pensée et l’intention de Notre première Lettre, Nous déclarons que seuls les évêques et archevêques non ordonnés et consacrés suivant la forme de l’Église ne peuvent être regardés comme ordonnés régulièrement et selon le rite.“ »[6]Encyclique Apostolicae Curae (13 Septembre 1896).
En bref, la validité d’une consécration épiscopale ne dépend pas de l’orthodoxie du consécrateur, d’une part, parce que les ennemis de l’Église n’ont aucun pouvoir sur le sacrement de l’ordre institué par Jésus-Christ, et d’autre part, parce qu’il n’est pas impossible qu’un clerc consacré par un non-catholique puisse devenir un pasteur légitime. Ce genre de situation arrive quelquefois par accident lorsqu’un prêtre de bonne foi désirant accéder à l’épiscopat ignore invinciblement les opinions hétérodoxes que dissimulait l’évêque qui l’a consacré. Certains pourraient nous opposer que, selon les lois de l’Église : « Une suspense “a divinis“ réservée au Siège apostolique, frappe par le fait même ceux qui ont la présomption de recevoir les ordres d’un ministre excommunié, suspens ou interdit après sentence déclaratoire ou condamnatoire, ou d’un apostat, hérétique ou schismatique notoire. »[7]Code de droit canonique de 1917, Livre V, Partie III, Titre 16, Canon 2372.
Mais comme l’indique le droit canon, cette sentence concerne uniquement les délits à caractère “notoire“, lesquels comprennent à la fois les péchés qui ont été divulgués « après la sentence du juge compétent » et ceux qui ont été « commis dans des circonstances telles qu’ils ne puissent être cachés par aucun artifice ni excusé par aucune considération. »[8]Code de droit canonique de 1917, Livre V, Partie I, Titre 1, Canon 2197, § 1 à 4 : « Le délit est : 1° “public“, s’il est déjà divulgué, ou s’il s’est produit ou se présente dans … Continue reading Cela est lié au fait que, dans la discipline de l’Église, il existe une distinction claire entre, d’un côté, les « délits dans l’administration ou la réception des ordres »,[9]Code de droit canonique de 1917, Livre V, Section II, Partie III, Titre 11. et de l’autre, les « délits contre la foi et l’unité de l’Église.[10]Code de droit canonique de 1917, Livre V, Section II, Partie III, Titre 16.
Afin de mieux comprendre l’esprit de cette loi, il faut se rappeler que, le 7 Juin 1639 (sous le pontificat d’Urbain VIII) le Saint-Siège a publié un décret stipulant que les personnes consacrées par des schismatiques pouvaient être acquittés de ce délit si jamais il existait une juste cause[11]Codificazione Canonica Orientale – Fonti, fasc. I, part I. Typographia Polyglotta Vaticana 1930, p. 79 comme l’enseigne également le code de 1917 promulgué par le pape Benoît XV.[12]Code de droit canonique de 1917, Livre V, Partie III, Titre 16, Canon 2372 : « Ceux qui ont été ordonnés de bonne foi par l’un d’eux sont privés de l’exercice de l’ordre ainsi … Continue reading Notons par exemple que l’Église avait déjà accordé ce type de concessions pour le sacrement du baptême …[13]Pape Eugène IV, Concile de Florence, Bulle Exultate Deo (22 Novembre 1439), Décret pour les Arméniens : “En cas de nécessité, ce n’est pas seulement un prêtre, ou un diacre, mais même … Continue reading
« C’est sur ce principe que s’appuie la doctrine d’après laquelle est valide tout sacrement conféré par un hérétique ou un homme non baptisé, pourvu qu’il soit conféré selon le rite catholique. » [14]Encyclique Apostolicae Curae(13 Septembre 1896)
Pape Léon XIII
« Mais je dois attirer votre attention sur ce point : il serait fallacieux de penser que, parce que quelqu’un a reçu les ordres d’un non-catholique, ou donné les ordres à un non-catholique, il devienne lui-même un non-catholique. Au XVIIème siècle, le Saint Office a statué explicitement, en réponse à un prêtre de rite oriental, qu’il n’y avait pas péché si des séminaristes catholiques avaient l’intention de recevoir l’ordination d’évêques grecs “orthodoxes“, donc schismatiques, pourvu qu’il y ait nécessité. […] Mais ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit : vous ne devez pas conclure que j’incite les gens à recevoir les ordres des évêques non-catholiques ; je dis simplement que les nécessités actuelles de l’Église en matière de consécrations ont pu rendre nécessaire l’approche d’évêques qui n’auraient pas été contactés en temps normal. »[15]Conférence donnée à l’école Saint-Joseph à Serre-Nerpol (Isère) le 17 Octobre 1999.
Mgr Daniel Lytle Dolan
Concernant la question des sacres sans mandats explicites, nous rappellerons que, dans certaines circonstances particulières, ce genre de consécrations peuvent être permises en vertu du principe d’epikie.[16]Précisons toutefois que la vertu d’épikie n’a strictement rien à voir avec la “l’éthique de situation“… Pape Pie XII, Discours au congrès de la Fédération Mondiale des … Continue reading Saint Thomas d’Aquin définissait cette vertu en ces termes : « L’épikie ne se détourne pas purement et simplement de ce qui est juste, mais de la justice déterminée par la loi. Et elle ne s’oppose pas à la sévérité, car celle-ci suit fidèlement la loi quand il le faut ; suivre la lettre de la loi quand il ne le faut pas, c’est condamnable. Aussi est-il dit dans le Code : “Il n’y a pas de doute qu’on pèche contre la loi si en s’attachant à sa lettre, on contredit la volonté du législateur.” Juger de la loi, c’est dire qu’elle est mal faite. Dire que les termes de la loi n’obligent pas en telle ou telle circonstance, c’est juger non pas de la loi en elle-même, mais d’un cas déterminé qui se présente. L’interprétation a lieu dans les cas douteux, où il n’est pas permis, sans la décision de l’autorité, de s’écarter des termes de la loi. Dans les cas évidents, ce qu’il faut, ce n’est pas interpréter, mais agir. »[17]Somme Théologique IIa-IIae, Question 120, Article I. De ce fait, les lois ecclésiastiques doivent donc nécessairement être interprétées en tenant compte des circonstances dans lesquelles celles-ci peuvent ou non être appliquées.[18]Abbé Anthony Cekada : « En ce qui concerne les lois ecclésiastiques humaines citées comme interdisant les prêtres catholiques traditionnels d’administrer les sacrements dans la … Continue reading
« Les lois, même irritantes ou inhabilitantes, n’obligent pas quand elles sont l’objet d’un doute de droit ; en cas de doute de fait, l’Ordinaire peut en dispenser, pourvu qu’il s’agisse de lois à propos desquelles le pontife romain a coutume d’accorder dispense. […] Les lois ecclésiastiques doivent être entendues, selon la signification propre que revêtent les mots dans le texte et le contexte ; si elle demeure douteuse et obscure, on doit se reporter aux lieux parallèles du Code, s’il en est, au but et aux circonstances de la loi, et à l’intention du législateur.Les lois qui édictent une peine, ou restreignent le libre exercice des droits, ou contiennent une exception à la loi sont soumises à une interprétation stricte. S’il n’existe aucune prescription ni dans la loi générale ni dans la loi particulière relativement à une espèce déterminée, on doit chercher une règle, à moins qu’il ne s’agisse d’infliger une peine dans les lois portées pour des espèces semblables, dans les principes généraux du droit observés d’après l’équité canonique, dans le style et la pratique de la Curie Romaine, dans l’opinion commune et constante des docteurs.Les lois édictées pour prévenir un danger général obligent, même si dans un cas particulier le danger n’existe pas. » [19]Livre I, Titre I, Canons 15, 18, 19 et 20.
Code droit canonique de 1917
« La nécessité rend licite ce qui est illicite. »[20]De Regulis luris, Livre V, Titre XVI, Règle n°4.
Pape Grégoire IX
De plus, si le pape Pie XII a effectivement décrété que les sacres sans mandats pontificaux n’étaient pas licites « même sous une contrainte grave »,[21]Décret du saint office concernant la consécration des évêques (9 Avril 1951).en revanche, ce souverain pontife n’a jamais dit que ces consécrations demeuraient illicites même en cas de nécessité. Or, pour saisir pleinement la véritable signification de l’épikie, il convient d’abord de faire la distinction entre, d’une part, ce qui relève de la contrainte, et d’autre part, ce qui relève de la nécessité. Lorsque l’on se trouve dans une situation de contrainte, la non-observance d’une loi peut constituer un péché, car comme l’expliquait l’abbé Berthier, même si « la contrainte peut empêcher l’acte extérieur, que la volonté commande », cependant, celle-ci ne peut pas « empêcher de vouloir. »[22]Abrégé de Théologie Domatique et Morale, Section II, Dissertation I, Partie II, Traité III, Chapitre I, Article II, § II, p. 132C’est pourquoi le pape Saint Pie V à censuré la théorie selon laquelle « la violence s’oppose à la liberté de l’homme. »[23]Pape Saint Pie V, Bulle Ex omnibus afflictionibus (1er Octobre 1567), Erreurs de Michel De Bay concernant la nature de l’homme et la grâce, proposition n°66 : « 66. Seule la violence … Continue readingNéanmoins, lorsque l’on se trouve dans une situation de nécessité, la non-observance d’une loi n’est plus un péché.[24]Cette doctrine ne signifie pas pour autant qu’il pourrait y avoir des circonstances durant lesquelles le péché deviendrait un acte nécessaire, car il n’existe aucune nécessité à faire le … Continue readingCe principe a aussi été enseigné par le pape Paul III qui, en citant Saint Augustin, déclara infailliblement que « Dieu n’ordonne pas l’impossible, mais en ordonnant il nous avertit de faire ce que nous pouvons, et de demander ce que nous ne pouvons pas. »[25]6ème session du concile de Trente (13 Janvier 1547), Décret sur la justification, Chapitre 11.En effet, « Personne n’est obligé à l’impossible » – nous rappelait le pape Pie XII – car « aucun législateur raisonnable ne peut-être présumé vouloir obliger par sa loi même à l’impossible. »[26]Discours aux participants du congrès de l’Union Catholique Italienne des sages-femmes (29 Octobre 1951).
Cet enseignement correspond précisément à la pensée du pape Saint Pie V qui a formellement condamné la proposition stipulant que « L’homme pèche également d’une manière qui mérite la damnation dans ce qu’il fait de façon nécessaire. »[27]Pape Saint Pie V, Bulle Ex omnibus afflictionibus (1er Octobre 1567), Erreurs de Michel De Bay concernant la nature de l’homme et la grâce, proposition n°67 : « 67. L’homme pèche … Continue readingÀ partir de là, nous pouvons aisément en déduire que si jamais le pouvoir civil faisait preuve d’ingérence dans la nomination d’un candidat à l’épiscopat, alors une telle consécration serait évidemment illicite.[28]Pape Pie XII, Encyclique Ad Apostolorum Principis (29 Juin 1958 ) : « Cela bien établi, il s’ensuit que les évêques qui n’ont été ni nommés ni confirmés par le Saint-Siège, qui … Continue readingLa raison étant que le pape Pie IV a décrété concernant « l’ordination des évêques » que « ceux qui sont appelés et institués par le peuple ou par une magistrature » et qui « s’élèvent à l’exercice de ce ministère, […] doivent être tenus, non pour des ministres de l’Église, mais pour des voleurs et des brigands qui ne sont pas entrés par la porte (Jean 10 ; 1). »[29]23ème session du concile de Trente (15 Juillet 1563), Doctrine sur le sacrement de l’ordre, Chapitre 4.Cet enseignement confirme les paroles du pape Saint Grégoire VII qui allait même jusqu’à déclarer que « pour un prêtre, enfreindre la loi de Dieu sur l’ordre du pouvoir temporel n’est rien d’autre que renier sa foi. »[30]Lettre à Cyrianus, Evêque de Carthage (15 septembre 1073).Don Bosco semblait également souscrire à cette doctrine en écrivant au sujet des apôtres que « lorsqu’ils allaient dans des villes ou il n’y avait pas encore de chrétiens, ils consacraient des évêques, des prêtres, et des diacres, sans solliciter aucun consentement, et moins encore le vote ou l’approbation des princes temporels. »[31]L’Église catholique et sa hiérarchie, XB éditeur, Chapitre VI, p. 72C’est certainement pour ce motif que le pape Pie IX dénonçait vigoureusement les gouvernements impies qui s’arrogeaient le droit de statuer que « les curés et les vicaires » ne devaient « remplir aucune fonction » ni « recevoir aucune dignité plus haute que celle que le suffrage populaire leur aurait conférée et qu’ils seraient par l’autorité civile astreints à un serment dont la formule contient une apostasie formelle », car « de telles lois sont non seulement nulles », mais de plus, « ce qu’elles prescrivent est tellement contraire aux dogmes de la foi catholique et à la discipline sanctionnée par le concile œcuménique de Trente et par les constitutions pontificales que c’est pour nous une obligation rigoureuse de les désapprouver et de les condamner. »[32]Encyclique Etsi Multa Luctuosa (21 Novembre 1873).En revanche, nous pouvons raisonnablement croire, sans crainte de se tromper, qu’en cas d’impossibilité d’avoir recours au pape, il serait parfaitement licite de consacrer un évêque sans avoir besoin d’une délégation explicite de sa part.[33]Toutefois, cette règle n’implique certainement pas que n’importe quel clerc aurait le droit de présumer d’un mandat pontifical, surtout si le clerc en question ne se trouve pas dans … Continue readingC’est en substance l’opinion que défendait le Révérend Père Henri Montrouzier en nous rappelant que « l’histoire rapporte, en le louant, l’exemple de saint Eusèbe, évêque de Samosate, qui, pendant la persécution Arienne, parcourait les églises pour les pourvoir de prêtres et de pasteurs fidèles. Mais pour louer ce trait et d’autres du même genre » – ajoutait-il – « il n’est pas nécessaire de remonter à une prétendue concession qui n’exista jamais » étant donné « qu’en vertu de la charité qui unit tous les membres de l’Église, les évêques se doivent une mutuelle assistance, pour laquelle ils peuvent à bon droit présumer le consentement du Pontife romain, dans les cas de nécessité imprévue », car « Il nous paraît évident que les vicaires apostoliques dont les jours sont ainsi menacés, peuvent et doivent sacrer bien vite au moins un évêque, afin de pouvoir efficacement à la conservation de la chrétienté. Mais de quel droit agiront-ils ? Serait-ce en vertu de la juridiction universelle conférée pour les cas extrêmes ? Non. Ils s’appuieront uniquement sur le consentement présumé du Pontife romain, dont en hommes sages ils interprètent les intentions. »[34]Origine de la juridiction épiscopale, Revue des sciences ecclésiastiques, p. 397Dans de telles conditions, l’Église exige seulement – si toutefois cela est possible – que « L’évêque consécrateur » tâche de « s’adjoindre de deux autres évêques pour l’assister dans la consécration, à moins qu’il n’ait obtenu dispense du Siège apostolique. »[35]Code de droit canonique de 1917, Livre III, Partie I, Titre 6, Canons 953 et 954.
« Le Christ a donné un mandat et un pouvoir aux Apôtres et à leurs successeurs ; et nous, évêques de l’Église catholique, nous avons été consacrés par un authentique successeur des Apôtres ; par conséquent, nous avons ce mandat et ce pouvoir, et nous avons le droit de nourrir les vrais fidèles avec la vérité qui ne change pas, parce qu’elle est éternelle, et qui ne se compromet pas avec l’erreur, parce qu’elle est divine. […] J’ai été consacré en Europe par un Archevêque catholique, et donc successeur légitime des Apôtres, pour lesquels je suis valablement consacré. Le pape n’a pas pu me nommer, car malheureusement, dans l’Église catholique, le Saint-Siège est vacant, et nous n’avons pas de pape, mais quand il y’en aura un, nous nous soumettrons à lui, comme successeur légitime de Saint Pierre, et nous lui paierons le tribut de notre obéissance et de notre amour. »[36]Lettre à “l’archevêque“ d’Hermosillo “Mgr“ D. Carlos Quitero (29 Avril 1983).
Mgr Moïsés Carmona Rivera
« Les évêques sacrés dans ces conditions (c’est-à-dire sans “mandat romain”) doivent évidemment se soumettre par avance au jugement du pape, si de leur vivant, Dieu donne un pape à l’Église. »[37]Article : “Consacrer des Évêques ?“ publié en Février 1986 dans le supplément n°3 de la revue “Sous la Bannière“ et paru dans le n°16 de la revue “Sodalitium“ en Avril … Continue reading
Mgr Michel-Louis Guérard des Lauriers
« Ce Lundi 30 Avril 1984, à Étiolles,[…]je vais conférer la consécrationépiscopale à Monsieur l’AbbéGünther Storck, en me conformant au rite du Pontifical Romain (la première partie exceptée), [38]Cette première partie correspond à la lecture du Mandat Romain.et en agissant publiquement. Le consécrateur (Guérard des Lauriers), et l’évêque consacré (Storck), s’engagent chacun personnellement, et d’ailleurs solidairement : premièrement, à n’user de la consécration épiscopale que pour perpétuer la “Missio”, c’est-à-dire pour confectionner validement tous les sacrements (en faveur de tout fidèle le désirant légitimement) ; et non en vue d’instituer une pseudo-sessio, en revendiquant à quelque titre que ce soit une juridiction ordinaire qu’ils reconnaissent ne pas avoir;deuxièmement, à se conformer toujours, tant pour l’enseignement du dogme et de la morale, que pour la catéchèse des fidèles, à la doctrine élaborée par Saint Thomas [d’Aquin] telle qu’elle a toujours été recommandée par la Sainte Église ; troisièmement, à se soumettre inconditionnellement au jugement que portera sur eux le Vicaire de Jésus-Christ, dès que, dans l’Église, l’ordre sera rétabli. Le consécrateur et le consacré rappellent que, par décret de Pie XII, (cf. Acta Aposticae Sedis, 21 Mai 1945) un seul consécrateur suffit pour assurer la validité. Les deux autres évêques, prévus dans le canon 954, doivent, s’ils sont présents, dire toutes les prières. Ils sont alors “co-consacrateurs“. »[39]Déclaration de Mgr Guérard des Lauriers sur le sacre de Monsieur l’abbé Günther Storck publiée dans : “Voix des Catacombes“, Nr 1 (1984), et citée dans : Einsicht. Credo ut … Continue reading
Mgr Michel-Louis Guérard des Lauriers
Notes
↑1 | Cette phrase semble indiquer que Ratzinger n’était pas tout à fait certain de la validité des sacres conférés par Mgr Thuc et Mgr Carmona. |
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↑2 | En d’autres termes, si Ratzinger estime qu’il est parfaitement licite d’aller prier dans une mosquée ou dans une synagogue (comme lui-même a déjà eu l’occasion de le faire à plusieurs reprises), en revanche, pour lui, participer à une Messe “non una cum“ est un sacrilège. |
↑3 | Notification de la congrégation pour la doctrine de la foi (12 Mars 1983). |
↑4 | Somme théologique, Partie III, Question 64, Article 8. |
↑5 | Somme théologique IIa-IIae, Question 39, Article 3. |
↑6 | Encyclique Apostolicae Curae (13 Septembre 1896). |
↑7 | Code de droit canonique de 1917, Livre V, Partie III, Titre 16, Canon 2372. |
↑8 | Code de droit canonique de 1917, Livre V, Partie I, Titre 1, Canon 2197, § 1 à 4 : « Le délit est : 1° “public“, s’il est déjà divulgué, ou s’il s’est produit ou se présente dans des circonstances telles, qu’on puisse juger avec prudence qu’il doive facilement être divulgué. 2° “Notoire de notoriété de droit“ après la sentence du juge compétent passée en force de chose jugée ou après l’aveu du délinquant fait en justice selon le Can. 1750. 3° “Notoire de notoriété de fait“, s’il est connu publiquement et a été commis dans des circonstances telles qu’il ne puisse être caché par aucun artifice ni excusé par aucune considération. 4° “Occulte“, s’il n’est pas public ; “occulte matériellement“ si le délit lui-même est caché ; “occulte formellement“ si son imputabilité seule est cachée. » |
↑9 | Code de droit canonique de 1917, Livre V, Section II, Partie III, Titre 11. |
↑10 | Code de droit canonique de 1917, Livre V, Section II, Partie III, Titre 16. |
↑11 | Codificazione Canonica Orientale – Fonti, fasc. I, part I. Typographia Polyglotta Vaticana 1930, p. 79 |
↑12 | Code de droit canonique de 1917, Livre V, Partie III, Titre 16, Canon 2372 : « Ceux qui ont été ordonnés de bonne foi par l’un d’eux sont privés de l’exercice de l’ordre ainsi reçu,jusqu’à ce qu’ils soient dispensés de cette prescription. » |
↑13 | Pape Eugène IV, Concile de Florence, Bulle Exultate Deo (22 Novembre 1439), Décret pour les Arméniens : “En cas de nécessité, ce n’est pas seulement un prêtre, ou un diacre, mais même un laïc ou une femme, bien plus, un païen ou un hérétique qui peut baptiser, pourvu qu’il respecte la forme de l’Église et ait l’intention de faire ce que fait l’Église.” Pape Paul III, 7ème session du concile de Trente (3 Mars 1547), Décret sur le sacrement du baptême, Canon 4 : « Si quelqu’un dit que le baptême, même donné par des hérétiques au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, avec l’intention de faire ce que fait l’Église, n’est pas un vrai baptême : qu’il soit anathème. » |
↑14 | Encyclique Apostolicae Curae(13 Septembre 1896) |
↑15 | Conférence donnée à l’école Saint-Joseph à Serre-Nerpol (Isère) le 17 Octobre 1999. |
↑16 |
Précisons toutefois que la vertu d’épikie n’a strictement rien à voir avec la “l’éthique de situation“… Pape Pie XII, Discours au congrès de la Fédération Mondiale des Jeunesses Féminines et Catholiques (18 Avril 1952) : « La loi morale, qui est universelle, peut suffire, et même être contraignante dans un cas singulier […]. Du reste, Nous opposons à “l’éthique de situation“ trois considérations ou maximes. La première : Nous concédons que Dieu veut premièrement et toujours l’intention droite ; mais celle-ci ne suffit pas. La seconde : il n’est pas permis de faire le mal afin qu’il en résulte un bien (Romains 3 ; 8). […] La troisième : il peut y avoir des situations, dans lesquelles l’homme, et spécialement le chrétien, ne saurait ignorer qu’il doit sacrifier tout, même sa vie, pour sauver son âme. Tous les martyrs nous le rappellent. » |
↑17 | Somme Théologique IIa-IIae, Question 120, Article I. |
↑18 | Abbé Anthony Cekada : « En ce qui concerne les lois ecclésiastiques humaines citées comme interdisant les prêtres catholiques traditionnels d’administrer les sacrements dans la situation actuelle : L’application de ces lois priverait les catholiques des sacrements et donc entraverait directement le bien commun recherché par l’Église dans toutes ses lois. […] Ces lois ecclésiastiques humaines seraient donc devenues nuisibles, et par conséquent, selon les principes généraux du droit expliqués par les théologiens moraux et les canonistes, elles cesseraient automatiquement. Cela inclut les Canons 953 et 2370 qui, autrement, interdiraient la consécration d’un évêque sans mandat apostolique (le document papal autorisant la consécration) parce que leur observation finirait par priver les fidèles des sacrements dont l’administration exige un ministre dans les Saints Ordres. […] Cela inclut également le Canon 879.1, qui régit la juridiction pour l’absolution… » (cf. Article : “Prêtres traditionnels, sacrements légitimes“, Juillet 2003). |
↑19 | Livre I, Titre I, Canons 15, 18, 19 et 20. |
↑20 | De Regulis luris, Livre V, Titre XVI, Règle n°4. |
↑21 | Décret du saint office concernant la consécration des évêques (9 Avril 1951). |
↑22 | Abrégé de Théologie Domatique et Morale, Section II, Dissertation I, Partie II, Traité III, Chapitre I, Article II, § II, p. 132 |
↑23 | Pape Saint Pie V, Bulle Ex omnibus afflictionibus (1er Octobre 1567), Erreurs de Michel De Bay concernant la nature de l’homme et la grâce, proposition n°66 : « 66. Seule la violence s’oppose à la liberté de l’homme naturel. [Censure] : Ces propositions ont été pesées par un examen rigoureux en notre présence ; bien que certaines puissent être soutenues dans une certaine mesure, au sens rigoureux et propre des termes visé par ceux qui les affirment, Nous les condamnons et les rejetons, comme étant selon les cas, hérétique, erronées, suspectes, téméraires, scandaleuses et offensant les oreilles pieuses. » |
↑24 | Cette doctrine ne signifie pas pour autant qu’il pourrait y avoir des circonstances durant lesquelles le péché deviendrait un acte nécessaire, car il n’existe aucune nécessité à faire le mal. Pape Innocent XI, Décret du saint-office (2 Mars 1679), Erreurs d’une doctrine morale plus laxiste, propositions n°62 et 63 : « 62. Une occasion prochaine de pécher ne doit pas être fuie lorsqu’il y’a une raison utile ou honnête de ne pas la fuir. 63. Il est permis de chercher directement l’occasion prochaine de pécher pour notre bien spirituel ou temporel, ou pour celui du prochain. [Censure :] Toutes les propositions sont condamnées et prohibées, telles qu’elles se présentent, à tout le moins comme scandaleuses et comme pernicieuses dans la pratique. » |
↑25 | 6ème session du concile de Trente (13 Janvier 1547), Décret sur la justification, Chapitre 11. |
↑26 | Discours aux participants du congrès de l’Union Catholique Italienne des sages-femmes (29 Octobre 1951). |
↑27 | Pape Saint Pie V, Bulle Ex omnibus afflictionibus (1er Octobre 1567), Erreurs de Michel De Bay concernant la nature de l’homme et la grâce, proposition n°67 : « 67. L’homme pèche également d’une manière qui mérite la damnation dans ce qu’il fait de façon nécessaire. [Censure] : Ces propositions ont été pesées par un examen rigoureux en notre présence ; bien que certaines puissent être soutenues dans une certaine mesure, au sens rigoureux et propre des termes visé par ceux qui les affirment, Nous les condamnons et les rejetons, comme étant selon le cas, hérétiques, erronées, suspectes, téméraires, scandaleuses et offensant les oreilles pieuses. » |
↑28 | Pape Pie XII, Encyclique Ad Apostolorum Principis (29 Juin 1958 ) : « Cela bien établi, il s’ensuit que les évêques qui n’ont été ni nommés ni confirmés par le Saint-Siège, qui ont même été choisis et consacrés contre ses dispositions explicites, ne peuvent jouir d’aucun pouvoir de magistère ni de juridiction ; car la juridiction ne parvient aux évêques que par l’intermédiaire du Pontife romain, […] Les actes relatifs au pouvoir d’Ordre, posés par ces ecclésiastiques, même s’ils sont valides – à supposer que la consécration qu’ils ont reçue ait été valide – sont gravement illicites, c’est-à-dire peccamineux et sacrilèges. On se rappelle à ce propos les paroles de sévère avertissement du divin Maître : “Qui n’entre pas dans le bercail par la porte, mais y entre par ailleurs, est un voleur et un brigand“ (Jean 10 ; 1) ; les brebis reconnaissent la voix de leur vrai pasteur, “mais elles ne suivent pas un étranger ; elles le fuient même parce qu’elles ne connaissent pas la voix des étrangers“ (Jean 10 ; 5). Nous savons bien, hélas ! que pour légitimer leurs usurpations, les rebelles se réclament de la pratique suivie en d’autres siècles, mais il n’est personne qui ne voie ce que deviendrait la discipline ecclésiastique si, en telle ou telle question, il était permis à n’importe qui de reprendre des dispositions qui ne sont plus en vigueur parce que la suprême autorité de l’Église en a décidé autrement depuis longtemps. Bien plus, le fait d’en appeler à une discipline diverse, loin d’excuser leurs actes, prouve leur intention de se soustraire délibérément à la discipline actuellement en vigueur, la seule qu’ils doivent suivre : discipline qui vaut non seulement pour la Chine et pour les territoires d’évangélisation récente mais pour toute l’Église ; […] De ce que Nous vous avons exposé, il s’ensuit qu’aucune autorité autre que celle du Pasteur suprême, ne peut invalider l’institution canonique donnée à un évêque ; aucune personne ou assemblée, de prêtres ou de laïcs, ne peut s’arroger le droit de nommer des évêques ; personne ne peut conférer légitimement la consécration épiscopale sans la certitude préalable du mandat pontifical. Une consécration ainsi conférée contre tout droit et qui est un très grave attentat à l’unité même de l’Église, est punie d’une excommunication réservée d’une manière très spéciale au Saint-Siège, et encourue ipso facto… » |
↑29 | 23ème session du concile de Trente (15 Juillet 1563), Doctrine sur le sacrement de l’ordre, Chapitre 4. |
↑30 | Lettre à Cyrianus, Evêque de Carthage (15 septembre 1073). |
↑31 | L’Église catholique et sa hiérarchie, XB éditeur, Chapitre VI, p. 72 |
↑32 | Encyclique Etsi Multa Luctuosa (21 Novembre 1873). |
↑33 |
Toutefois, cette règle n’implique certainement pas que n’importe quel clerc aurait le droit de présumer d’un mandat pontifical, surtout si le clerc en question ne se trouve pas dans l’incapacité de l’obtenir… Pape Grégoire XII, 15ème session du concile de Constance (6 Juillet 1415), Erreurs de Jean Hus, proposition n°18 : « 18. Quiconque accède au sacerdoce reçoit par mandat la fonction de prêcher ; et il doit exercer ce mandat nonobstant une prétendue excommunication. » (Proposition condamnée). |
↑34 | Origine de la juridiction épiscopale, Revue des sciences ecclésiastiques, p. 397 |
↑35 | Code de droit canonique de 1917, Livre III, Partie I, Titre 6, Canons 953 et 954. |
↑36 | Lettre à “l’archevêque“ d’Hermosillo “Mgr“ D. Carlos Quitero (29 Avril 1983). |
↑37 | Article : “Consacrer des Évêques ?“ publié en Février 1986 dans le supplément n°3 de la revue “Sous la Bannière“ et paru dans le n°16 de la revue “Sodalitium“ en Avril 1988. |
↑38 | Cette première partie correspond à la lecture du Mandat |
↑39 | Déclaration de Mgr Guérard des Lauriers sur le sacre de Monsieur l’abbé Günther Storck publiée dans : “Voix des Catacombes“, Nr 1 (1984), et citée dans : Einsicht. Credo ut intelligam, Nr. 3, (Août 1984), p. 70 |